L'univers des écrits de et sur Albert Londres






pour chaque article : illustrations, aphorismes "londresiens" et accès au Fac similé intégral du journal en pdf.


Le Juif errant est arrivé


En 1929 le long périple en Europe de l'est pour décrire la vie des communautés juives dans ces pays fait l'objet du reportage "le Drame de la race juive : des ghettos d'Europe à la Terre Promise" en 27 articles. Une version reprise et agrandie sera publiée l'année suivante sous le titre plus connu "le Juif errant est arrivé". Deux récits : la réduction des communautés juives à l'état de vies animales et soumises aux progromes d'une part, et d'autre part "leur planche de salut" qu'est l'exil en Palestine. On reste confondu qu'en 1930 AL décrive ainsi les deux volets de ce qu'il appelle "la race juive" : les exterminés d'Europe de l'est d'un côté, les assimilés occidentaux (France, Angleterre, Etats-Unis) de l'autre. Entre les deux l'Allemagne qui est à 2 ans de l'arrivée de Hitler au pouvoir, n'attire pas l'attention !

Les descriptions de progromes et d'existence de ces sous-populations évoquent pour nous celles que nous donneront les nombreux récits de l'holocautse qui suivra de peu. Le style s'efface devant le réalisme difficielemnt soutenable. La géopolitique va poindre dans le deuxième volet du reportage, celui de Palestine, où AL décrit avec lucidité les composantes du drame qui va empoisonner la vie dans ces territoires, c'est déjà le conflit israélo-palestinien.



Le Petit Parisien 5 octobre 1929
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Un personnage extravagant





Le Petit Parisien 6 octobre 1929
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Nous retrouvâmes Chicksand street





Le Petit Parisien 7 octobre 1929
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Le coeur d'Israël bat toujours





Le Petit Parisien 8 octobre 1929
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Théodore Herzl



Ah! Ces journées de Bâle! Israël, pour la première fois depuis vingt siècles, se réunit. Polonais, Hongrois, Allemands, Français, Russes, Anglais, Hollandais, Américains, Egyptiens, Mésopotamiens, Yéménites, c'est-à-dire un peu noirs sinon nègres. Des glabres, mais surtoiut des barbes, encore des barbes. Et les papillottes battant les tempes ! Tous ces frères qui ne s'étaient jamais vus se regardant le nez avec stupéfaction ! Herzl, devant cette vivante carte du monde, trembla. Son souffle pourrait-il fondre ces âmes pour n'en faire qu'une seule?

Alors eut lieu le fait surnaturel. L'assemblée, un instant hésitante, se dressa, fascinée. La race dispersée venait de voir apparaître la statue de la race. Après un quart d'heure de délire, Ben-Ami, traduisant la pensée unanime, lançait à la face de Herzl le vieux cri hébraïque : Jechi Hamelech! Vive le roi!







Le Petit Parisien 9 octobre 1929
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La randonnée des Juifs
Quelle randonnée que celle des Juifs! Ils viennent du troisième âge du monde : exactement du jour où le Seigneur, établissant Abram comme le père, changea son nom en Abraham. C'était, croit-on, aux environs de l'an 1920 - avant Jésus-Christ... Titus, délégué en Palestine par la Société de Nations..pardon par Vespasien, son père, détruit à nouveau le Temple et saccage Jérusalem. C'est alors que les Juifs prirent leur bâton et s'en allèrent par le monde. Où allèrent-il? La masse s'embarqua sur des galères. Le plus gros convoi toucha les rives occodentales, connues aujourd'hui sous le nom de côtes d'Espagne et de côtes de France. Je les vois divisés en multiples colonnes, suivant les rivières et les fleuves, et précédés d'un homme de tête qui seul portait quelque chose : un rouleau de parchemin : la Loi!.

Je ressens assez vivement l'angoisse qui dut les étreindre quand ils apprirent que la papauté avait chargé Charlemagne de constituer l'Occident en un empire où règnerait le christianisme. Les hommes de tête déroulèrent certainement leur rouleau. Les Juifs se masssèrent autour de la Loi. Pas d'erreur, leur loi s'oppaosait aux ordres de Charlemagne. Et la nouvelle passion des Juifs commença.

Quel que soit le roi des pays qu'ils abordaient, la croix les écrasait de son ombre sans cesse grandissante. A leur approche, les masses grondaient. Ils s'arrêtèrent où ils étaient pour se terrer. Ce fut la naissance du ghetto. Nous étions au Moyen-Age.



Le Petit Parisien 10 octobre 1929
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Les voilà !
A 36° sous zéro, il faut se raser la moustache. Autrement vous n'avez plus de poils sous le nez mais des glaçons. Prague, sous le neige, est une si jolie dame !
J'y venais saluer le cimetière juif et la synagogue. Ils représentent, en Europe, les plus vieux témoins de la vie d'Israël. Ce n'est pas un cimetière, mais une levée en masse de dalles funéraires, une bousculade de pierres et de tombeaux. Près du cimetière, à cent mètres, on voit la synagogue. Elle est petite. Mais là n'est pas le fait qui la distingue. Qu'est-ce donc? Elle a l'air de se présenter sous un masque. En effet, elle est gothique....une synagogue ressemblant à une église.

Je vais prendre le train. Je quitte le monde civilisé et je descends au pays des ghettos. Je me rends d'abord à Mukacevo. C'est le bout de la Tchécoslovaquie. Cependant, il s'appelle la Russie sud-carpathique. En fait c'est la Ruthénie.



Le Petit Parisien 11 octobre 1929
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Et ce n'est que Mukacevo!
Mais d'où sortent-ils? Abraham, sont-ce là tes enfants? Et ce n'est que Mukacevo! Que cachent les ravins et les crêtes des Carpates? Ils fuyaient de Moravie, de la petite Pologne, de la Russie. Les uns dans l'ancien temps, les autres dans les nouveaux, chassés par la loi, la faim, le massacre.
Et depuis 1882 les quinze ou seize cents progromes de Russie ont mis en marche les survivants. Ils sont Hébreux plus que Déroulède fut français. Où donc se sont-ils préservés de la contagion européenne? Dans le ghetto.

Le Wunderrabbi est le rabbin sorcier, le faiseur de miracles. Ces Wunderrabbi les ont faits comme nous les voyons. Ce sont eux qui les empêchent de s'assimiler et d'émigrer. Attendent-ils encore le Messie? Oui! C'est pourquoi le reste leur est égal.
Les deux rabbins sorciers qui opèrent en Russie sud-carpatique habitent en Roumanie. Pour chacun d'eux, l'autre est un charlatan. Le rabbin est aussi médecin, vétérinaire, avocat-conseil, sage-femme, agent matrimonial. Il peut quelque chose pour le commerce et pour la femme stérile. C'est le grand féticheur d'Israël.



Le Petit Parisien 12 octobre 1929
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Les Juifs sauvages
Bouchina, premier nid. Nous marchions vers des cabanes mal groupées. Les Juifs surgirent. La plus folle collection de têtes que des épaules aient portées! Des Neptunes, des patriarches, des Rembrandts, des boucs, de jeunes et de vieux vautours, des chevaux à barbe, des Raphaëls! Du paradis terrestre au jardin d'Acclimatation!
Vingt degrés de froid dans l'étable. Les enfants en bas âge vêtus seulement d'une chemise. Les deux plus grands étaient groupés non autour d'un poêle : autour d'un livre. Les plaintes de la mère ne les arrachaient pas à leur lecture. Pour moins grelotter de froid, ils grelottaient de piété sur le talmud. Et l'odeur? une odeur de cadavre moisi, macéré dans un jus d'oignon.



Le Petit Parisien 13 octobre 1929
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J'ai rencontré le Juif errant

J'ai rencontré le Juif errant. Il marchait dans les Carpates, peu après le village de Volchovetz. Ses bottes étaient trouées, ses chaussettes l'étaient aussi. Un caftan bien pris à la taille l'habillait du cou aux chevilles. Sur sa chevelure noire, un chapeau large et plat d'où s'échappaient deux papillotes soignées achevait sa figure légendaire.
C'était lui, Ahasvérus. Ses chaussures n'étaient pas encore trop usées depuis dix-neuf cents ans ! Il avait quitté sa cabane depuis neuf jours, allant de villages juifs en villages juifs. En apercevant le juif éternel sur la piste de neige, je ne pensais pas qu'il vendait des crayons et des bougies, mais qu'il marchait vers Jérusalemm.
La terre? la terre est mauvaise et appartient aux Ruthéniens. Ils la possèdent de moitié avec la neige (six mois eux, six mois la neige). Le Juif n'a que sa barbe, ses papillotes, quelques chars de bois à convoyer et le rabbin.



Le Petit Parisien 14 octobre 1929
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Le spectre
Mainteant un spectre nous barre la route...Le spectre s'appelle pogrome. Le pogrome moderne est né en Russie, sur le trône d'Alexandre III, au cours de l'année 1881. Plus d'un million de battus et pillés, rien que pour l'Ukraine et la Galicie, en 1918 et 1919. Quand on les étudie de près on remarque que les progromes se présentent sous trois formes : la forme non sanglante, la forme sanglante, la forme cruelle et sadique.

Il n'est pas indispensable, pour être sauvage, de vivre nu. Les nôtres, les sauvages européens, soldats des bandes d'Ukraine, étaient bottés, vêtus et décorés. A Felchtine, à Chargorod, à Pestchanka, les cosaques sont encore plus cosaques. Ils coupent les langues, crèvent les yeux. Ils forcent les mères à leur présenter leurs enfants à bout de bras et décapitent la petite victime. On déshabille les hommes, on les unit par la main, on leur ordonne de chanter, de danser, puis :"Feu!"

On ne pense pas sans saisissement que les Juifs sont les inventeurs du bouc émissaire. Leurs prêtres chargeaient l'animal de tous les péchés et le chassaient devant eux.



Le Petit Parisien 15 octobre 1929
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La famille Meiselmann





Le Petit Parisien 16 octobre 1929
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Le pionnier de Palestine


L'homme qui nous reçoit tranche nettement sur toute la race juive de ce pays. C'est un haloutz un pionnier de Palestine. Le pionnier est en mission.

Il est ici, depuis deux mois et rejoindra jérusalem dans trois mois. Je vois le premier Jeune-Juif ! Le pionnier tire de sa poche un mince carnet bien cartonné. Il tourne et le retourne c'est un passeport. Il est maintenant citoyen, citoyen palestinien. Citoyen juif, précise-t-il, comme pour chasser de nos esprits une dernière ombre.







Le Petit Parisien 17 octobre 1929
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Voulez-vous aller à Jérusalem ?

Czernowitz est la capitale de la Bukovine, elle s'appelle aujourd'hui Cernaiti. C'est une ville à pic. C'est une ville qui n'a pas peur. perdue au milieu des terres, elle se prend pour un port de mer.

Sur cent quarante mille habitants, Cernauti compte quatre-vingt mille Juifs, et sur cent commerçants, quatre-vingt-douze Juifs. Cernauri n'a pas d'eau, pas même un goutte, mais elle possède toutes les compagnies de navigation du monde. La foule, sous le froid, attendait à leurs portes comme les passionnés de Manon sur le trottoir de l'Opéra-Comique.

La Palestine c'est bon pour les très riches et les très pauvres, ceux qui n'ont rien à perdre et ceux qu n'ont plus besoin de gagner.




Le Petit Parisien 18 octobre 1929
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Le ghetto de Lwow

A Lwow le Juif n'a que sa part. Ils sont quatre-vingt mille contre deux cent mille Polonais. Si l'on donne au mot contre son sens de choc, il est plus juste de dire que deux cent mille Polonais sont contre quatre-vingt-mille Juifs. Le Lwow polonais est une jolie ville. Mais nous venons pour l'autre Lwow.
"A quelle désolation êtes-vous réduits? A quelle horrible confusion! Vos maisons ont été jetées à terre" C'est du ghetto de Lwow, certainement, que Jérémie voulait parler. Le quartier nage dans l'odeur d'oignon et de hareng. Un marché? un champ d'épandage oui! Le premier jour, je dus sortir une fois, précipitamment, de l'un de ces chenils pour calmer les nausées provoquées par l'odeur. Nous descendons dans une cave. Aucun bruit de voix, trente-deux personnes habitent cependant ces logements souterrains. Nous pataugeons dans la boue. Deux petits enfants de trois ou quatre ans, les mains et les pieds enveloppés de chiffons, mais en chemise, sont debout grelottants contre un grabat. Une femme est là.. Les Juifs nous montrent la cause de l'épouvantable odeur. Le tout-à-l'égoût du quartier passe dans leur demeure.



Le Petit Parisien 19 octobre 1929
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Mais...Varsovie !

Salut à la capitale juive d'Europe...et pardon aux Polonais ! Leur métropole est aussi celle d'Israël. Ici, plus de papillotes. Ils les ont perdues sous les ciseaux des cosaques qui avaient reçu des tsars l'ordre de les couper dans la rue. Le gouvernement polonais les a mis hors de l'activité polonaise. Il leur a fermé les portes comme employés. Les porteurs des gares ont fait expulser les porteurs Juifs. Barrés de tous les côtés, ils ont tous reflué vers Nalewki.

L'un des points principaux du programme politique polonais : "tasser" les Juifs. Il n'y parvint pas. Les Juifs sont trois millions et demi en Pologne. La population totale dépasse trente millions. Les trois millions et demi de Juifs paient quarante pour cent des impôts.

La Communauté de Varsovie est dirigée par un triumvirat : un Juif orthodoxe, un Juif socialiste, un Juif sioniste. Leur commerce ne va que quatre jours et demi par semaine, à cause du fameux sabbat. Le gouvernement polonais ne les empêche pas de fermer le vendredi soir et le samedi, mais il les oblige à chômer le dimanche.
Les recoins de ce Nalewki ne sont pas tous explorés, même de la police. Le vendredi soir, au coucher du soleil, le grand rideau du sabbat tombe sur cette métropole, le rideau qui sépare le peuple de Dieu du chien de chrétien. Tout se vide.



Le Petit Parisien 20 octobre 1929
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L'usine à rabbins

Je suis au seuil de la Mesybtha le grand séminaire juif de la juiverie du monde. la jeunesse senstionnelle, celle qui mendie son pain et sa couche dans Namewki, ces figures de seize à vingt-deux ans, ascétiques, inspirées, dévorées par l'esprit moloch, ces porteurs du feu d'Israël, tous sont là. L'odeur est spécialement juive - juive orthodoxe. Cette odeur est un mélange d'essence d'oignon, d'essence de hareng salé et d'essence de fumée de caftan. La passion d'apprendre est aussi uniquement juive.

Ils étaient cinq cent quatre-vingt-sept fougueux dans cinq chambres étroites, ivres, complètement ivres. Depuis sept heures, ils ne cessaient de boire, de boire la science, la connaissance, le savoir, la découverte. Ils travaillent ainsi de seize à dix-sept heures par jour. Qu'apprenaient-ils? D'abord, le Talmud par coeur. C'est le livre des interprétations. C'est l'amour de la discussion poussée jusqu'à la déraison. Ils demeurent sept années au milieu de cet incendie de cerveau. La pureté de leurs moeurs est légendaire.

Avoir un gendre qui sort de la Mesybtha de Varsovie est si flatteur que les pieux orthodoxes, de peur d'en manquer, viennent les prendre au nid.




Le Petit Parisien 22 octobre 1929
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La bourse ou les meubles






Le Petit Parisien 23 octobre 1929
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Chez le rabbin miraculeux

Nous voici au pays d'un zadlick. Israël possède une douzaine de rabbins miraculeux. Qu'est un zadlick? C'est l'interprète terrestre de la volonté de Dieu. Par la solitude, il entre en contact avec l'Eternel. Chaque rabbin miraculeux est, bien entendu, l'ennemi des autres rabbins miraculeux. Les aumônes pleuvent chez le faiseur de miracles. L'une des plus étranges, et qui me semble inédite, est le tant pour cent qu'il touche dans les affaires commerciales et industrielles.
Ulica Pijarska. Nous sommes certainement dans le bon chemin, puisque c'est la seule rue de Goura-Kalvarya. C'est le zadlick. Sa barbe est blanche et son regard a la dureté du diamant. Un regard qui invite l'esprit du visiteur à faire un rétablissement.



Le Petit Parisien 24 octobre 1929
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Adieu Ben!

On va se quitter mon cher Ben. Vos parents de la galanterie frémissent-ils toujours au souvenir des progromes? Peut-être reverrai-je le pionnier de Kichinev à Jérusalem?

Ces pauvres Juifs de Lwow, tout de même! Et ceux de Cracovie? Quel dommage qu'ils refusent de se laisser photographier.
Le peuple juif est comme les autres peuples. Il a ses satisfaits et ses malheureux. Et les satisfaits ne s'occupent pas des malheureux.

Je suis un Juif qui cherche son chemin. Quand un alpiniste de chez vous, couche au refuge, croit-il avoir atteint le sommet? Nous sommes bel et bien divisés en quatre :

les Juifs de chez vous : les assimilés;
les Juifs d'ici : les emprisonnés;
les Juifs de Palestine : les illuminés
les Juifs comme moi; un alpiniste qui n'a pu jusqu'ici gravir que les Carpates.

J'ai mendié dans Nawelki le pain de ma jeune science. Je me suis réveillé devant le rabbinat. Je n'oublie pas mon arrivée dans la communauté de Podosk: un village dans la boue, deux chiens affamés. On dit que nous sommes obséquieux. Nous sommes simplement des hôtes où que nous soyons.

Si le sionisme a de l'avenir, ne manquez pas de me l'écrire de Jérusalem.

Sinon, pensez à moi quand vous reviendrez à Paris. Je parle treize langues...




Le Petit Parisien 26 octobre 1929
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La terre promise

Voilà le soleil. J'ai quitté Varsovie, l'année 5690. J'entre dans l'an X. Devant nous : la Palestine. Voici les deux villes jumelles de cette côte : l'ancienne : Jaffa la musulmane; la nouvelle : Tel-Aviv la juive. Un peuple attend cette ville depuis dix-neuf siècles. Les Juifs ont maintenant une capitale. Tel-Aviv! la seule ville au monde comptant cent pour cent de Juifs. Où sont mes caftans, mes barbes, mes papillotes? Voilà mes Juifs : tête nue, rasés, le col ouvert, la poitrine à l'air et le pas sonore. Et les Juives? Elles ont jeté leurs perruques aux ordures, coupé leurs cheveux et mis leurs seins au vent !
Et les coiffeurs, celui qui conserve un poil sur la figure à tel-Aviv est un bouc obstiné. Toutes les trois ou quatre maisons un coiffeur vous appelle. Et les avocats? Ô Dieu! A peine réunis sur la Terre sainte, voilà, Juifs, que vous vous chicanez à tous les coins de rues? Et vous, docteurs médecins? Tout Tel-Aviv se porte allègrement.



Le Petit Parisien 27 octobre 1929
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Au prix du sang

Les Arabes n'avaient-ils jamais vu de Juifs en Palestine? Sauvés des progromes et ruinés par eux et probablement écoeurés, ces Bessarabiens, ces Ukrainiens remplis de littérature biblique, prenant le nom de Chovévés-Sion, d'Amants de Sion, étaient venus, comme au temps de l'Arche d'Alliance, marier leur nouvel espoir au sol historique. Le pays était moins généreuse que le disait la sainte Thora. Il n'y coulait, ni lait ni miel ni eau. Ruinés, battus, exsangues, les Chovévés-Sion traînaient. .. Un ange passa! il laissa tomber de l'argent, de la quinine, et du lait et du miel. Il parla aux Turcs le langage du carnet de chèques. Il créa des écoles, des hôpitaux. Il paya les dettes. Cet ange, c'était le Baron. Le baron de Palestine est Edmond de Rotschild. Il est le seul individu de la terre qui posssède une colonie. C'est d'une toute autre classe que d'avoir une écurie de courses !
Les Juifs nouveaux retournèrent la pièce. Le docteur en droit devint terrassier, l'étudiant, paysan. Ce casseur de pierres vendait des tableaux à Moscou. Ce gardien de vaches était violoniste à Prague. Ce coiffeur de Tel-Aviv plaidait brillamment à Lwow. Cette fermière chantait au Grand théâtre de Varsovie... jusquà ce jour, je n'avais connu que des Juifs banquiers!



Le mur des lamentations
texte ajouté dans le livre





Le Petit Parisien 28 octobre 1929
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Holà! l'Europe!




Le Petit Parisien 30 octobre 1929
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Les soldats du grand Mufti



Le Petit Parisien 1 novembre 1929
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A bientôt !


Que disent les Arabes ? Les Juifs, au cours de l'histoire, ont occupé accidentellement quelques coins de la Palestine, mais jamais toute! Ils n'ont rien laissé comme civilisation. Cinq cent soixante ans plus tard, l'Islam triomphait. Nos pères reprenaient la terre et la rendaient à leur ancienne nationalité.

Des Faits! Premièrement, nous reprochons aux Juifs de nous ruiner. L'ouvrier juif est payé deux fois plus que l'ouvrier arabe.
Deuxièmement, nous leur reprochons de nous brimer. Les lois sont contre les Arabes et pour les Juifs.

Troisièmement, nous leur reprochons de nous pousser hors de chez nous. Ils nous disent : "si vous n'êtes pas contents, prenez les os de vos prophètes, et allez-vous en." A la place du Juif errant, alors, l'Arabe errant?"





Le Petit Parisien 3 novembre 1929
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Le bonheur d'être Juif

Aucun Juif n'est venu de France rebâtir le royaume de David. L'Angleterre en possède un. Il a une belle âme qui visite sans cesse sa figure. La Hollande aussi en a un : un magistrat d'Amsterdam. La Tchécoslovaquie a donné des professeurs; la Belgique des planteurs; l'Allemagne, des architectes; l'Amérique, de riches amateurs.

L'odeur de la Terre promise ne trouble pas seulement les va-nu-pieds. Ces messieurs qui rôdent par le pays, l'âme chavirée, regardez-les; ce sont des millionnaires. Mais le fond de la troupe vient des troupeaux de Lituanie, d'Ukraine, de Bessarabie, de Bukovine, de Galicie.

Heureux? Profondément heureux d'être juifs. Ailleurs, partout dans le monde, quand un Juif commet une mauvaise action, ce n'est plus ni un Français, ni un Allemand, ni un Belge, ni un Anglais, c'est un Juif! Un Juif découvre-t-il une grande chose? Fait-il honneur à l'humanité? Alors, ce n'est plus un Juif, c'est un Allemand, un Belge, un Anglais, un Français. Pour chacun, Einstein est allemand, Bergson est français.






Le Petit Parisien 5 novembre 1929
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Juif errant, es-tu arrivé?
Quant cet hiver, je l'ai rencontré cheminant dans les Carpates, j'ai bien pensé qu'il marchait vers la Palestine. Si la terre ne se composait que de la France ou de l'Amérique, de l'Allemagne ou de l'Angleterre, il n'y aurait pas de sionisme. Les Juifs de l'Atlantique ont cessé d'être des Juifs de Sion. Sous Godefroi de Bouillon tous les chrétiens ne furent pas des croisés.
Plaçons donc la question juive où elle est : en Pologne, en Russie, en Roumanie, en Tchécoslovaquie, en Hongrie. Là, erre le Juif errant. En Russie, les Juifs attendent d'être égorgés. Haine sur eux en Pologne, haine sur eux en Roumanie.
Après toutes ces histoires, je me trouvais sur la plage de Tel-Aviv. C'était le premier jour de l'année juive... des Juifs semblaint fouiller leur poitrine et en arracher quelque chose...ensuite, ils balançaient leurs bras en direction de la Méditerranée : ils jetaient leurs péchés à la mer! A la bonne heure! me dis-je, ils ont enfin compris. Pour peu qu'ils n'oublient pas de noyer leur trop d'orgueil, tout ira bien après.
Est-ce une prophétie? Le Juif errant est-il arrivé? Pourquoi pas?


Le Petit Parisien 7 novembre 1929
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Cet article qui clot le reportage du petit-Journal en réponse aux demandes faites par les lecteurs, n'a pa été repris dans le livre




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