L'univers des écrits de et sur Albert Londres






pour chaque article : illustrations, aphorismes "londresiens" et accès au Fac similé intégral du journal en pdf.


La Chine en Folie


Ce recueil a été publié en 1925, trois ans après le voyage d'Albert Londres en Extrême-Orient, Japon, Chine, Indochine et Inde. Pour la Chine, il avait alors publié sept articles dans l'Excelsior décrivant la situation chaotique et comme souvent lors de ses reportages, inteviewant les plus hauts dirigeants qui sont aussi de grands bandits et des tyrans.
Un premier livre rédigé l'an suivant avait paru chez Fayard dans les "Oeuvres Libres" avec huit chapitres distincts. Le présent livre a été publié ensuite sous le même titre que le précédent "la Chine en Folie" mais avec un contenu très différent. Il ne s'agit pas à proprement parler de reportage sur le vif mais d'un ensemble de courts récits qui content des épisodes picaresques ou tragiques en des lieux divers.


En "racontant" trois ans après son voyage une série de faits dont la chronologie n'apparaît pas, Albert Londres aborde un genre de récit nouveau. On retrouve certaines formes "décalées" dans la description des évènements, ainsi que des jugements lapidaires dont l'humour est souvent noir. Cependant l'irréalisme de certaines situations amène à prendre une certaine distance vis-à-vis de l'ensemble du récit, qui mêle certains faits historiques avérés à des anecdotes rapportées beaucoup plus douteuses.


Prologue
Et, si tout le monde ne le sait pas déjà, que chacun l'apprenne ici : il est bien préférable, pour un correspondant en voyage de curiosité de rencontrer sur son chemin une tribu de scorpions que deux gentlemanen de la police anglaise

Il était l'intoxiqué des sleepings et des paquebots. Et, après des années de courses inutiles à travers le monde, il pouvait affirmer que, ni le regard d'une femme intelligente et malgré cela proprement faite, ni l'attrait d'un coffre-fort, n'avaient pour lui le charme diabolique d'un simple et rectangulaire petit billet de chemin de fer.

Tel est le pays
Le peuple est une punaise que les hommmes en armes écrasent dès qu'il ose sortir des plinthes.
Vingt et une provinces, vingt et un tyrans. L'un vend sa part de Chine au Japon, l'autre aux Américains. Pour chacun le pays est un butin. Il ne s'agit que de faire main basse dessus, alors on ouvre les enchères.
Les villages moins malins sont ravagés. Les dames qui ont horreur de l'imprévu dans le plaisir se jettent dans les puits pour échapper au rut déchaîné.
La Chine a perdu la tête. Par compensation, elle a deux cerveaux : Pékin au nord, Canton au sud...Au point de vue politique, Pékin est une ville dans le genre de Saint-Denis et de Sceaux : elle est supprimée.

Coolie je veux dormir
Le vent cinglait et passait au papier de verre les joues du pauvre reporter.
Si l'enfer, au lieu d'être un endroit où l'on cuit, était un lieu où l'on gèle, l'avenue de Moukden serait l'aveue qui conduit chez Satan.

Un reportage est un reportage
Es-tu bien sûr, me dis-je, que les lecteurs de ton journal attendent chaque matin, le coeur battant, des nouvelles de MM. Wou-Pé-Fou et Tsang-To-Lin ? Un beau crime à Ménilmontant l'emportera toujors sur une guerre dans la province du Tchély, mon ami

fantastique histoire de Tsang-Tso-Lin
Il a 23 ans, c'est le bel âge pour choisir une carrière. Sur le chemin du retour, il a trouvé sept fusils. Il racole six clampins de son âge. Avec lui comme chef, cela fait aussitôt sept brigands. Dix ans passent vite. Les Japonais et les Russes tombent alors subitement amoureux fous du pays du Matin Calme, qui porte le joli petit nom de Corée. Les Japonais louent Tsang-Tso-Lin, lui donnent argent, armes, souliers et bénédictions. La guerre cesse. Tsang est riche. Il tient la Mandchourie entière sous son pistolet.
Il est impitoyable pour les pillards, les irréguliers, les bandits. Son armée est de trois cent mille hommes.

Du consulat à l'évêché
Je saute dans le rickshaw. En Extrême-Orient le coolie pousse-pousse répond toujours "yes !" Il vous charge et part sans savoir où il va. Les curés? Les voici, que leur voulez-vous?
Son accueil était si franc que l'on eut pu croire qu'il avait étalé son âme sur sa barbe. Mon père, je n'ai pas de métier, alors je fais ce que je peux. Je voyage pour les journaux. "Vous payent-ils au moins ?" Quand ils me voient, c'est pourquoi ils m'expédient au loin. Donc, je viens ici pour Tsang-Tso-Lin. Je veux voir ce bandit. "C'est un de nos amis". Les moeurs de Son Excellence se sont visiblement améliorées. Aussi, n'exécute-t-il plus de sa propre main.

Chez Tsang-Tso-Lin
Deux messieurs chinois se trouvaient à quatre pattes devant mon lit...Ils s'inclinèrent une fois encore jusqu'au carrelage et, tous les deux en même temps, l'un s'exprimant en chinois, l'autre en auvergnat, ils m'annoncèrent que leur maître illustre me donnerait audience à trois heures, cet après-midi.
Même pour un coeur boucané, ces cités sont écoeurantes. On n'ose pas jeter à terre le bout de sa cigarette, par pitié pour lui. Tsang-Tso-Lin, le tyran, brusque les préliminaires. Il n'est pas plus grand que Napoléon. Sa tête est celle d'un épervier qui, depuis un mois, n'aurait pas trouvé un seul bon morceau de charogne à se mettre sous le bec... La Chine est grande, grande, finit par murmurer le tyran...Il susurre : la Chine est la Chine, le reste du monde est le reste du monde.

Galka ou la nouvelle esclave
Depuis trois jours une femme chantait dans la chambre voisine. Le soir à huit jeures elle entra dans la salle à manger...Ecoute, me dit-elle la nuit suivante, il faut que je te raconte mon histoire...Tu me demandes pourquoi je suis enfermée dans cet hôtel?...Je suis blonde, jolie et russe, je suis l'espionne. Tu vois, j'attends. Enfant, lui dis-je, prends du thé, car je vois bien que tu as froid. Non! dit-elle, cette nuit encore j'aurai chaud, tu ne t'en vas que demain soir.

Le marchand de peaux
Quand j'arrivai à la baraque qui servait de gare à cette ligne-là, un Européen en fureur frappait du pied contre le guichet fermé...Le guichetier montra le nez. Le marchand de peaux se mit à l'insulter avec un accent bourguignon....Ils m'insultent en chinois depuis dix-sept ans et je ne comprends pas ce qu'ils me disent, alors je leur rends la pareille.

Une journée assez curieuse à Pékin
Le ministre par intérim demande le remplaçant du président. On ne l'a jamais vu. Il demande l'intermédiaire du remplaçant. On ne l'a pas vu davantage. Alors, dans un moment de décision, il remet sa démission au portier.
Un ancien ministre exilé veut me faire déjeuner. Je suppose qu'il doit se cacher. Il a d'autres hôtes...le chef de la police!..J'ai des milliers d'hommes sous mes ordres...je ne puis plus mettre le nez dehors. Dès qu'ils m'apercoivent, ils me sautent desssus et me demandent de les payer.

Où il faut huit démaches pour y voir clair
En Chine, avez-vous un président de la République ou un empereur? Eh bien ! clairement, le chef de l'Etat est le président de la République, mais il y a l'empereur, bien entendu, et pour moi, le maître est Tsing-Tsao-Lin.
Alors, la Chine n'est pas une république? Si fait. Mais l'Empereur? C'est l'empereur de la république de Chine. Cette république a un président. C'est donc, si vous préférez, l'empereur du président de la république de Chine.

Le festin ou l'éloge de l'anarchie
On dit au voyageur...L'empire du Milieu est en ruine. Ne longez jamais ses murs, les tuiles tombent. Il ne possède plus rien de ce qui fait la force des Etats : ni président du Conseil, ni ministres, ni généraux à lui. Il a un empereur, deux présidents de la république, trois super-dictateurs et dix-huit tyrans moyens.
Maintenant, voilà le plat national. C'étaient des arêtes de raies qui baignaient dans du cambouis...
L'anarchie résiste dans le cerveau des hommes de ton espèce. Vous vous figurez, en Europe, que vous détenez la vérité. Parce que chez vous vos pays ont un gouvernement à leur tête, vous croyez d'abord que c'est le gouvernement qui fait marcher le pays, ensite que tout autre pays, pour fonctionner, doit avoir comme le vôtre un gouvernement. Confessez votre erreur. Nous, nous n'avons plus rien...mais le pays vit. Jamais le pays n'a mieux vécu que depuis qu'il n'y a plus d'État.

Deux illustres Chinois en pantoufles
Au centre de la Chine, se trouve un homme au nom mutin : Wou-Pé-Fou. ce charmant garçon a trois cent mille sokdats; C'est le baudet. Nous voulons dire que c'est sur lui qu'on crie haro ! Et, au Nord, mon vieil ami de grands chemins, le coupe-jarret Tsang-Tso-Lin, se prépare à l'attaquer.
Ce combat aura lieu non en l'honneur d'une femme, ce qui aurait de la branche, mais de deux Chinois en pantoufles : le maréchal Tuang-Si-Joui. Le président du Conseil en congé, Liang-Che-Ji.

Shangaï
Quand tous les coins du monde seront devenus des Shangaï, le monsieur ayant encore le goût des choses de l'esprit devra, sur-le-champ, acheter un revolver, le poser sur sa tempe, penser une dernière fois à sa famille, jouer à pile ou face, perdre et se brûler la cervelle... Il est une ville s'appelant Shangaï. Elle a devant elle toutes les routes de toutes les mers et, dans son dos, quatre cent millions d'individus...on l'ouvre au marché des blancs. Avis. Ce fut une ruée...tous les gentlemen de banques et tous les sarafs de bazar se jetèrent, ventre à terre, sur la ville promise.
Voici la concession française. C'est la seule. Les autres sont confondues dans la concession internationale. Il y a un conseil municipal, tout comme à Pontoise et à Paris. Puis il y a la ville chinoise. Elle assurera le bonheur de mes vieux jours. Je raflerai toutes les pinces à linge que je trouverai. Je reviendrai sur le Whangpoo...tout le monde achètera mon petit instrument pour se boucher le nez. Je deviendrai millionnaire
Shangaï n'a qu'une pensée : le jeu...mais on en devient fou.

Une conversation inattendue
Le docteur Yen, président du Conseil par intérim et ministre des Affaires étrangères par bonté d'âme, m'attendait au Wai Chiao Piu. Je craignais, monsieur le ministre, de ne pas arriver à temps. depuis vingt jours, la première nouvelle qui me réveille est celle de votre démisssion. Vous devez la donner tous les soirs à six heures. Le docteur Yen expliqua : "On croit communément, que le plus difficile, dans les carrières comme la mienne, c'est de devenir ministre, hélas! monsieur, c'est de cessr de l'être"
Savez-vous que j'ai vu Tsang-Tso-Lin à Moukden? Quel beau bandit! C'est le plus magnifique de ma collection. "Chut! fit M. le docteur Yen, président du Conseil par intérim et ministre des Affaires étrangères par résignation, parlez plus bas, les avant-gardes de M. le maréchal Tsang-Tso-Lin ne sont plus qu'à trente kilomètres de ce bureau"

Grand sauve-qui-peut
Pékin était devenue un immense Magic City. Les Célestes montaient, descendaient, s'entrechoquaient, patinaient, fonçaient, hurlaient, jetaient des matelas par les fenêtres, cassaient des assiettes, tiraient des femmes, des enfants et des coups de fusils! Ils chargeaient sur leur dos des armoires, des lits... Dans la panique, on avait attelé les chameaux aux voitures à boeufs, les boeufs aux voitures à ânes, les ânes aux voitures à bras. J'entrai chez moi. Deux petits pieds grelottants dépassaient sous mon lit. C'étaient ceux de la concubine à Pou!

Deux correspondants de guerre
Je suivais la ligne de chemin de fer Pékin - Tien Tsin. Le combat se livrait sur cette voie. Je finirais bien par tomber sur lui...Enfin j'aperçus du monde. Tsang-Tso-lin? fis-je...Je marchais pendant trois kilomètres encore.
hello ! How are you ? Wad-Price ! Vieille chose ambulante ! lumière du Daily Mail, confrère et frère, que f...-vous là ? "Pourquoi m'a-t-on détourné par ici (il arrivait de Washington!)" Pour me dire bonjour. "Que se passe-t-il?" La Chine, mon ami....




  wwwwwwwwww ww2018 - Les aphorismes d'Albert Londreswwwwwwwwwwwwwwwwwwwtous droits réservéswwwwwwwwwwwwwwwww

>